Dans les zones productrices de coton et de céréales d'Afrique de l'Ouest, les progrès de la production céréalière réalisés au cours des dernières décennies sont largement reconnus. Cependant, l'augmentation des rendements et revenus agricoles n'a pas apporté une meilleure nutrition. Alors que les niveaux d'apports caloriques ont augmenté, la malnutrition dans les exploitations familiales reste omniprésente principalement en raison d'un manque de diversité alimentaire : pas assez de catégories d'aliments (correspondants aux groupes nutritionnels recommandés) sont consommées en plus de l'alimentation de base. Un certain nombre d'établissements de recherche et enseignement supérieur ont récemment plaidé en faveur d'une agriculture qui réponde aux besoins nutritionnels. Des systèmes agricoles variés (combinant élevage, cultures et ressources naturelles) sont notamment de plus en plus souvent invoqués pour mieux répondre à des formes spécifiques de malnutrition, telles que les carences en micronutriments des membres des ménages agricoles, par rapport aux systèmes de cultures spécialisés. Cependant, la capacité des systèmes agricoles variés à apporter une plus grande diversité alimentaire au niveau des ménages agricoles n'est pas encore prouvée et est controversée.

Sur la base de travaux conceptuels et empiriques menés au Burkina Faso, le projet répondra aux questions suivantes :

• Quelles sont les relations et les interactions entre la diversité de la production, les ressources naturelles et diversité alimentaire au niveau des ménages et des villages?
• Comment la diversité de l'alimentation est-elle liée à la résilience du ménage agricole et au-delà?
• Quelles sont les opportunités et les contraintes des ménages et individus pour maintenir un niveau ad hoc de diversité, à la fois toute l'année et sur le long terme? Et enfin,
• Comment les actions sur la nutrition peuvent-elles saisir ces opportunités pour répondre aux contraintes ?

Plusieurs raisons peuvent expliquer le manque de diversité alimentaire: un manque de production de nourriture diversifiée, un manque d'approvisionnement ou de possibilités d'accès à des produits alimentaires variés provenant des marchés ou de la nature. Ce manque de production / offre / accès à la diversité pourrait à son tour être lié à la répartition du pouvoir et au contrôle des ressources au sein du ménage qui régissent les priorités et les processus de décision. Enfin, dans ce contexte sahélien très vulnérable, les caractéristiques saisonnières et les risques qui pèsent sur la disponibilité alimentaire ou les schémas de revenus et de dépenses nécessitent une adaptation permanente par les ménages, ou une transformation des ménages, pour répondre à leurs besoins alimentaires.

L'étude de la diversité du régime alimentaire nécessite également de faire ressortir certaines caractéristiques souvent négligées, à savoir les ressources naturelles et celles issues des jardins familiaux. Ces ressources peuvent représenter une source importante de diversité à des moments critiques, et pour des groupes spécifiques, en fonction de leur disponibilité et des droits d'accès qui leur sont attachés. Le nombre élevé de causes possibles, la manière dont elles interfèrent et les changements dans des laps de temps intra-annuels et pluriannuels exigent une recherche interdisciplinaire approfondie nécessitant des outils d'analyse conceptuels et empiriques.

 Le consortium du projet comprend des institutions de recherche du Burkina Faso (Inera et Irsat) et de la France (Ird, Cirad) et des acteurs du développement (Gret). Tous les partenaires ont déjà travaillé pendant plusieurs années dans l'ouest du Burkina Faso. Le projet leur permettra dans un premier temps d'échanger sur leurs connaissances spécifiques et disciplinaires (agriculture, environnement, nutrition et économie domestique). Différents modèles théoriques seront ensuite développés pour représenter

(i) le processus de décision intra-ménage de la production à la consommation et vice versa

(ii) les relations entre le niveau ménage et le niveau village / région

(iii) la gestion intra-annuelle de la diversité alimentaire dans les ménages agricoles.

Le projet s'appuie sur des méthodes mixtes innovantes, combinant travail de terrain qualitatif et quantitatif, approches participatives et modélisation. Le cœur du travail de terrain sera une enquête intégrative et complète menée auprès d'environ 100 ménages et de leurs membres. La conception et l'analyse de l'enquête intégrative rassemblera les différentes compétences disciplinaires de l'équipe du projet.

Le projet apportera des connaissances scientifiques originales et pertinentes sur le lien agriculture-nature-alimentation au niveau des ménages agricoles, et fournira des directives conceptuelles et pratiques aux acteurs du développement et décideurs politiques permettant à tous les membres des ménages agricoles de bénéficier d'une alimentation plus diversifiée sur une base permanente.